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mercredi 28 novembre 2012

La guerre des best-sellers

 Cet article a été initialement publié sur Le monde

La guerre des best-sellers

M le magazine du Monde | • Mis à jour le



A l'intérieur de l'immense librairie Waterstones de Piccadilly, au centre de Londres, la file d'attente traverse le rez-de-chaussée et s'élève jusqu'à l'autre bout du deuxième étage. A l'extérieur, elle s'enroule autour de l'immeuble et effectue un lacet au milieu de la très chic Jermyn Street. Au total, un bon demi-kilomètre d'une foule composée de personnes de tous âges, de toutes origines, de tous profils sociaux. Une chose les unit : 99 % sont des femmes. Un vrai rêve de dragueur professionnel, d'autant plus pimenté que toutes sont là... pour parler de sexe sadomaso.

Ce rassemblement exceptionnel se tient en l'honneur de E. L. James. L'auteure britannique, de son vrai nom Erika Leonard, est présente en cette soirée de début septembre pour dédicacer son
livre, Cinquante nuances de Grey (Fifty Shades of Grey, en anglais). Derrière une allure de discrète mère de famille de 49 ans, se cache LA star actuelle du monde de l'édition. Son livre s'arrache à travers le monde entier : en dix-huit mois, 40 millions d'exemplaires ont été vendus, essentiellement aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne.
Les deux tomes suivant de la trilogie, Fifty Shades Darker et Fifty Shades Freed, sont en route pour la même gloire. Dans le monde des livres, où vendre à 100 000 exemplaires est un succès et à 1 million un triomphe, il s'agit d'un ovni, qui s'apprête à débarquer en France : la traduction sera publiée le 17 octobre, et les deux autres tomes sont prévus en 2013.
"PORNO POUR MAMAN"
L'ouvrage est une romance à l'eau de rose plutôt bien ficelée mais légère, pimentée de scènes de sexe explicites à caractère sadomasochiste. Il met en scène l'éducation sexuelle d'Anastasia Steele, une étudiante maladroite - et vierge -, par Christian Grey, un jeune entrepreneur milliardaire de Seattle, qui manie le fouet, le cuir et la domination. Du "porno pour maman", comme a rapidement été surnommé le livre, qui a fait l'effet d'une violente décharge d'adrénaline chez les sages mères de famille new-yorkaises, avant de progressivement conquérir le reste du monde.
Parler de best-seller serait presque injuste : ses ventes sont actuellement plus rapides que celles de Harry Potter à son apogée ! Aux Etats-Unis, l'ouvrage est resté vingt semaines en tête des ventes compilées par USA Today, un record depuis que la liste a été créée en 1993. A sa sortie en Grande-Bretagne, en avril, le succès a été tel que l'éditeur a dû faire imprimer des exemplaires en urgence en Allemagne, les stocks d'encre métallique utilisée pour la couverture étant épuisés en Angleterre.
Joy et Hayley Ashfern n'auraient raté la dédicace de E. L. James pour rien au monde. "Nous sommes arrivées ici à 5 heures du matin et il y avait déjà deux personnes devant nous", racontent les deux soeurs d'une vingtaine d'années, venues exprès de Coventry pour l'événement. Les jeunes filles avaient tout prévu : des cardigans un peu épais contre le froid, des chaises pliantes et un casse-croûte pour passer sans trop de mal ces treize heures sur le trottoir londonien.
Depuis le phénomène Harry Potter, c'est la première fois que l'édition mondiale est secouée par un tel «tsunami». C'est justement son auteure, J.-K. Rowling, qui crée l'autre événement de la rentrée. Le 27 septembre, sortira son premier livre pour adultes, Une place à prendre. Comme avec l'apprenti magicien, les librairies du monde entier se préparent au déferlement : beaucoup seront ouvertes spécialement à un horaire précis pour vendre les premiers exemplaires ; depuis plusieurs semaines, les lecteurs peuvent réserver le livre sur Internet ; la campagne publicitaire a été lancée, coordonnée entre Paris, Londres, New York...

INFORMATIONS AU COMPTE-GOUTTES
«L'affrontement» entre les deux oeuvres, qui par coïncidence sortent presque en même temps en France, va être suivi à la loupe par le monde de l'édition. Car derrière la bataille des ventes, se joue aussi l'avenir du livre. D'un côté, Cinquante nuances de Grey, lancé sur Internet en catimini, devenu célèbre grâce au bouche-à-oreille et aux réseaux sociaux. De l'autre, Une place à prendre, vendu comme un blockbuster américain, à grand renfort de publicité et de teasing savamment entretenu.
Tenter d'en savoir plus sur Une place à prendre relève de la mission impossible. De ce livre à venir, personne ne sait rien. Tout est cadenassé, dans le plus grand secret. L'auteure - forte de ses plus de 450 millions d'exemplaires vendus avec Harry Potter - a imposé ses conditions, avec des clauses extrêmement sévères. Elle a d'ailleurs changé d'éditeur pour mieux asseoir son contrôle, quittant Bloomsbury - et Gallimard en France - pour signer un accord mondial avec Hachette, via Little, Brown pour le monde anglophone, et Grasset et Le Livre de poche pour la France.
Les informations sur Une place à prendre arrivent au compte-gouttes. Au printemps, la couverture et le titre ont été révélés. En même temps, un très court résumé était diffusé : il s'agit d'une histoire située dans un petit village anglais, d'apparence idyllique mais "en proie aux tourmentes les plus violentes", où rancœurs et haines vont éclater au grand jour à l'occasion d'une élection municipale.Et c'est tout. Aucun exemplaire ne sera envoyé à la presse en avance. Ni à personne d'autre.
Patron des éditions Grasset, l'éditeur français du livre, Olivier Nora en est réduit à jouer au muet du sérail. Quand on lui demande s'il a lu l'ouvrage, il élude la question : "Je ne dirai rien sur ce livre, dont je rêve qu'il soit lu pour ce qu'il est. Il est à mes yeux et son meilleur et son seul ambassadeur, n'a nul besoin de "story telling" ou de récit de coulisses. Que les mots, pour une fois, viennent avant les chiffres !", répond-il par courriel. "J. K. Rowling a toujours rêvé de mettre au même niveau les fans de la première heure que sont ses lecteurs et les journalistes", explique Christine Baker, l'éditrice française de Harry Potter, chez Gallimard Jeunesse.
A défaut d'exemplaires envoyés en avance, une entrevue avec J. K. Rowling est-elle imaginable ? N'y pensez pas ! La dame, dans sa grande bonté, en accorde cinq en Grande-Bretagne — dont trois à la BBC  — et trois aux Etats-Unis. En France, elle a choisi TF1 et ELLE pour présenter son livre. En désespoir de cause, peut-être serait-il possible de parler avec les rares et heureux journalistes qui vont interviewer J. K. Rowling ? Merope Mills, rédactrice en chef du magazine du samedi du Guardian, qui réalise un long entretien de l'auteure, avait accepté initialement de nous parler. Mais elle a finalement tout annulé dans un courriel un peu gêné. "La maison d'édition a entendu parler [de notre entretien] et m'a demandé de ne pas le faire."

LE TIRAGE ? MYSTÈRE ABSOLU
Bref, impossible de parler à la femme qui allait voir la femme... Le piratage constitue la principale crainte de J. K. Rowling. Certains pays comme l'Italie, la Slovénie ou la Finlande n'ont pas été jugés suffisamment fiables pour que son nouveau livre y soit lancé le 27 septembre. Y envoyer une copie à traduire aurait créé un risque de fuite. Pour Harry Potter, il y avait eu de véritables menaces physiques : des imprimeurs avaient été cambriolés, une éditrice de Bloomsbury agressée dans la rue, ses poursuivants lorgnant sur son sac, censé contenir le fabuleux trésor...
Quant à la stratégie marketing, personne ne veut en parler. Quel tirage ? Mystère absolu — sauf aux Etats-Unis, où le chiffre de 2 millions d'exemplaires est communiqué. Rowling semble avoir voulu une campagne "minimaliste". "Elle a des idées très claires sur la promotion de son livre", a déclaré, au magazine AdAge, Patricia Bostelman, vice-présidente de marketing de Barnes & Noble, le plus gros libraire des Etats-Unis, qui retransmettra en direct la première présentation du livre.
Sa tournée de promotion américaine a été méticuleusement planifiée. Elle présentera son livre le 16 octobre au Lincoln Center, à New York. Les entrées (37 dollars, livre compris) se sont vendues en quelques heures sur Internet. De plus, le buzz est habilement géré. Michael Pietsch, le directeur général de Little, Brown, la maison d'édition anglo-saxonne de J. K. Rowling, est l'une des rares personnes à avoir lu Une place à prendre. Dans le quotidien USA Today, il a tressé des lauriers à l'ouvrage, comparant J.K. Rowling à Dickens, "par son humour, son engagement social et la profondeur de ses personnages".
Difficile de le contredire ou d'approuver, puisque personne d'autre ne l'a lu. Paul Kozlowski, sous-directeur de la maison d'édition Other Press, compare la sortie d'Une place à prendre à celle des blockbusters d'Hollywood. "La première semaine, tout le monde va vouloir l'acheter car la curiosité sera énorme. Mais si les critiques sont mauvaises, si le bouche-à-oreille n'est pas très positif, les ventes risquent de s'effondrer assez rapidement. Le succès est prévu, c'est un éventuel échec qui serait la véritable histoire."
TWITTER ET FACEBOOK LARGEMENT UTILISÉS
Face à cette gloire annoncée, préparée, cadenassée, le phénomène Cinquante nuances de Grey a suivi un parcours radicalement opposé. La réussite de E. L. James vient avant tout d'Internet. Tout commence parce que cette Londonienne qui travaille dans la production d'émissions de télévision est une passionnée de Twilight, la saga à succès racontant la relation entre une jeune Américaine et un vampire.
Comme passe-temps, elle écrit sur un site de fans un roman mettant en scène deux des personnages de la série, dans une histoire d'amour torride et très sexuelle. La romance crée le buzz, ce qui pousse l'auteure à réécrire le livre, mais cette fois en changeant les personnages et en ôtant les références à Twilight. Le résultat, Cinquante nuances de Grey, suscite au printemps 2011, une deuxième vague d'intérêt chez les amies des amies des fans de Twilight. Les soccer mums de New York, ces mères de famille qui se retrouvent sur le terrain de football de leurs enfants, s'en emparent. D'autant plus facilement qu'elles le lisent sur leur tablette électronique, en toute discrétion. Pas de couverture de livre à caractère sexuel embarrassante à cacher, évitant les regards de travers des autres mamans ou des passagers du métro...
Le livre s'est ainsi répandu aux Etats-Unis. La maison d'édition Random House finit par s'intéresser à ce succès populaire. Et en mars, un accord mondial est signé pour le publier. Depuis, le phénomène ne cesse de s'amplifier. "Notre stratégie a été complètement à l'opposé des livres traditionnels, explique Laurence Festal, qui gère le marketing pour Random House à Londres. Normalement, il y a beaucoup d'anticipation, de nombreux événements organisés la semaine du lancement. Là, cela a été l'inverse : les campagnes publicitaires se sont faites après le lancement, pour surfer sur la vague d'intérêt que cela suscitait."
Twitter et Facebook ont été largement utilisés, le premier pour son influence, le second pour fonder une communauté de fans. Avec une règle au niveau du marketing : ne pas mettre en avant les scènes de sexe. Les médias - qui parlent beaucoup du livre - s'en chargent. Les publicitaires ont préféré se contenter de souligner l'ampleur du phénomène, avec un slogan : "Lisez le livre dont tout le monde parle." Pour Random House, la forte présence du livre sur les réseaux sociaux permet aussi une approche marketing extrêmement précise. "On sait que ce sont surtout des femmes de plus de 35 ans qui lisent Cinquante nuances, explique Laurence Festal. Pour les publicités, on peut donc viser spécifiquement des segments très précis : par exemple les femmes de 35 à 45 ans qui font leurs courses chez John Lewis [grands magasins britanniques]."
LE TOUT-HOLLYWOOD SPÉCULE DÉJÀ
Après les Etats-Unis, le Royaume-Uni, mais aussi l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et la Grèce, l'Hexagone cédera-t-il à son tour à la vague du "porno pour maman" ? Isabelle Laffont, patronne des éditions Lattès, qui ont acquis les droits de l'ouvrage en avril, attend avec intérêt la réponse à cette question. "Je l'ai lu en anglais et j'ai été séduite par cette héroïne qui découvre l'amour et le sexe en trois volumes. Cela peut toucher un public large, ce n'est pas du Christine Angot."Au printemps, les éditeurs français ne se sont pourtant pas bousculés pour acheter les droits du livre. "Il y a toujours des réticences en France sur ce genre de littérature, jugé bas de gamme", poursuit l'éditrice.
Lattès a en tout cas choisi d'organiser un lancement à la hauteur des espérances. Pour le 17 octobre, le tirage initial est de 380 000 exemplaires, soit le plus important de l'année. L'auteure E. L. James se rendra à Paris à cette date. Le livre, dont les deux autres tomes sont prévus début 2013, bénéficiera d'un atout supplémentaire : il sera accompagné pour son lancement français d'une BOL, une "bande originale du livre". La maison de disques EMI a en effet réalisé une compilation des morceaux de musique classique qui rythment les trois volumes. Sans compter que les studios Universal ont acquis les droits du best-seller et que le tout-Hollywood spécule déjà sur le futur casting et sur le nom du scénariste  — l'écrivain sulfureux Bret Easton Ellis ayant récemment été écarté de la liste.
Qui de J. K. Rowling ou de E. L. James remportera cette bataille ? La réponse importe puisqu'elle illustrera l'évolution du monde de l'édition à l'heure d'Internet. Depuis Cinquante nuances de Grey, les éditeurs anglo-saxons sont beaucoup plus «connectés», surtout aux Etats-Unis où, cette année, les ventes de livres électroniques ont augmenté de 28 %. En Grande-Bretagne, grâce à sa tablette Kindle, Amazon vend depuis cet été plus d'e-books que de livres en papier.
INTRUSION D'INTERNET
Comme pour les journaux il y a une décennie, Internet est sans doute en train de faire table rase des règles de l'édition. Le Web encourage en particulier l'auto-édition, qui ne coûte presque rien (lire p. 46). La jeune Américaine Amanda Hocking, 27 ans, en est un récent exemple. Cette jeune assistante sociale d'Austin (Minnesota) a décidé en 2010 de publier sur Amazon un de ses romans fantastiques, De mon sang (sorti cet été en France), qui avait essuyé les refus de différents éditeurs et qui raconte la vie sentimentale des vampires, un récit calqué - encore une fois - sur la saga Twilight.
En six mois, elle en a vendu 150 000 exemplaires, suffisamment pour attirer l'attention de St. Martin's Press, qui l'a éditée un an après. Elle est depuis devenue millionnaire. Les maisons d'édition prennent le train en marche. "Acheter un livre qui a déjà des fans est nettement moins risqué que de parier sur un nouvel auteur", souligne Paul Kozlowski, de Other Press.
L'intrusion d'Internet dans l'édition pose cependant d'importants problèmes. L'un d'eux concerne le prix. En Grande-Bretagne, Cinquante nuances se vend en moyenne 5 euros, et seulement 4 en ligne. Logique : la vente ayant commencé par le Web, la maison d'édition n'a pas voulu augmenter le prix lorsque la version papier est sortie. "C'est typique du marché des livres de nos jours : tout y est de moins en moins cher", souligne Philip Stone, qui travaille au magazine The Bookseller.
Pour se rassurer, les maisons d'édition traditionnelles soulignent que le phénomène de Cinquante nuances n'est vraiment devenu planétaire qu'une fois qu'il est sorti en livre papier. "Il a fallu une grande maison d'édition capable de lancer une vraie campagne de pub et une distribution à grande échelle pour créer un succès mondial", souligne M. Kozlowski. Peut-être. Mais dans le monde de l'édition française, où l'e-book demeure encore confidentiel, tous les acteurs devraient suivre avec beaucoup d'attention le sort de Cinquante nuances de Grey.


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