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mercredi 28 novembre 2012

Fondateur de Michelin

Cet article a été à l'origine publié sur Les échos

Les Michelin, par Tristan Gaston-Breton, historien d'entreprises (09/08/2000)

Après quarante-quatre ans de règne, François Michelin a cédé l'an passé les commandes du géant mondial des pneumatiques à son fils Edouard, trente-sept ans. Une transmission de pouvoir préparée depuis une bonne dizaine d'années. C'est qu'à Clermont-Ferrand, on n'a pas l'habitude de malmener les rites de succession au sein de la « gérance »...

En 1959, le général de Gaulle eut droit à un traitement de faveur. En visite à Clermont-Ferrand, le fondateur de la Ve République eut le privilège de pénétrer dans des unités de recherche-développement de l'usine Michelin, un site quasiment aussi protégé que la salle des commandes de la force de frappe nucléaire. Bien sûr, l'escorte du général _ ministres et autres notables _ dut patienter à l'entrée des bâtiments... C'est cela la légende Michelin : un assemblage d'anecdotes sur les cocasses manies de prudence, de secret et d'économie d'une famille qui aura réussi à construire _ hors des sphères du pouvoir parisien _ l'une des rares et authentiques multinationales françaises (plus de 90 milliards de francs de chiffre d'affaires et plus de 100.000 salariés répartis dans le monde). Michelin, entreprise intégralement mondialisée qui se flatte de son enracinement dans la terre d'Auvergne. Michelin, colosse industriel d'avant-garde que les relais d'opinion se plaisent à accompagner d'une imagerie désuète.
L'histoire des Michelin est
étroitement liée à la ville de Clermont-Ferrand. Tout commence en 1832 dans les premiers temps du règne de Louis-Philippe, avec l'association de deux industriels : Edouard Daubrée et Aristide Barbier. La fabrication et la vente de bandes en caoutchouc, mais aussi la réalisation d'articles en fer, telle est l'activité de la société que les deux associés installent place des Carmes à Clermont, là où se trouve toujours l'usine historique de Michelin. La manufacture Barbier & Daubrée connaît un bel essor. La mort des fondateurs ouvre une ère de crise. Dirigée par le fils d'Aristide Barbier, l'entreprise ne tarde pas à connaître de lourdes difficultés. En 1886, la situation est à ce point désespérée que la famille Barbier décide de faire appel à un proche cousin : André Michelin. Pourquoi ce choix ?
Né en 1853, André Michelin était le fils de Jules Michelin et d'une fille Barbier. Jules avait commencé sa carrière comme employé des Douanes, réservant tout son temps libre à sa véritable passion : la peinture. Paysagiste de talent, il avait participé à la plupart des salons des années 1850 et 1860. A la suite de son mariage avec Adèle, il était entré au bureau parisien de Barbier & Daubrée, sans pour autant lâcher ses précieux pinceaux.
Quant à son fils André, diplômé de l'Ecole centrale, il avait créé à Bagnolet une prospère société de charpentes métalliques. Au début des années 1880, il avait épousé Sophie Wolff, la fille d'Auguste Wolff, célèbre fabricant de pianos, faisant ainsi son entrée dans la grande bourgeoisie. A trente-trois ans, le voilà donc invité à s'installer à Clermont-Ferrand avec pour mission d'éviter le dépôt de bilan de Barbier & Daubrée. Dès son arrivée place des Carmes, le jeune homme décide de réorienter les productions de l'entreprise. Son premier succès est un patin de frein pour véhicule à cheval. Deux ans après son arrivée, les affaires ont si bien repris qu'André Michelin décide d'appeler à ses côtés son frère Edouard, deuxième fils de Jules Michelin. Les deux frères n'ont rien en commun. Né en 1846, licencié en droit, Edouard Michelin a été reçu premier au concours de l'Ecole des beaux-arts avant d'être admis dans l'atelier de William Bouguereau. Réticent, au départ, à répondre à l'appel de son frère, cet authentique artiste prend finalement le chemin de Clermont-Ferrand. En 1889, la firme Barbier & Daubrée devient la société en commandite par actions Michelin & Cie. André ayant souhaité ne pas totalement perdre de vue ses affaires parisiennes, c'est Edouard, l'artiste contrarié, qui est nommé gérant.
Deux ans plus tard, les deux frères décident de se consacrer entièrement au caoutchouc et au pneu à chambre à air, inventé en 1888 par l'ingénieur Dunlop. « Il faut inventer un pneu immédiatement démontable que le premier imbécile venu puisse remonter », lance Edouard à son frère. En 1891, l'invention est prête. Testé lors de la course cycliste Paris-Brest-Paris, le pneumatique arrive bon premier, entraînant un afflux massif de commandes. C'est le début d'une fulgurante ascension qui, en quelques années, portera Michelin au premier rang mondial du secteur. En 1896, la firme sort les premiers pneus pour fiacres à cheval, en 1895, ses premiers pneus automobiles, pour la promotion desquels les deux frères n'hésitent pas à prendre eux-mêmes le volant de « L'Eclair » pour l'une des premières courses automobiles de l'histoire. Suivent des pneus pour poussettes et pour les chaises roulantes, à chaque fois plus résistants. Innovateurs et techniciens de génie, Edouard et André accordent également une importance primordiale à la promotion pour laquelle ils emploient le ton direct, sobre et logique qui restera toujours celui de la maison. Après le célèbre slogan « Le pneu Michelin boit l'obstacle » en 1895, c'est la naissance, trois ans plus tard, du célèbre Bibendum dont Edouard a l'idée devant une pile de pneus. En 1900 enfin, André Michelin crée le célèbre Guide pour les automobilistes. Les premières étoiles de restaurants seront accordées en 1925.
Au début du siècle, la firme est déjà le premier fabricant de pneumatiques au monde. Avec plus de 700 ouvriers, l'usine de la place des Carmes est également l'une des plus modernes de son temps. Paternalistes à la façon du XIXe siècle, les deux frères ont multiplié les institutions sociales pour leurs salariés. Services médicaux, colonies de vacances, installations sportives et logements sociaux fleurissent à Clermont-Ferrand. La firme est également l'une des premières à instituer un système de participation aux bénéfices. Jusqu'à la crise des années 30, Michelin & Cie continuera ainsi sur sa lancée. Dès 1905, la firme exporte ses pneumatiques en Grande-Bretagne et en Allemagne. Deux ans plus tard, une première usine est ouverte aux Etats-Unis tandis que sont lancés les pneus antidérapants à bandes de roulement plates puis les pneus basse pression. En 1928, l'usine clermontoise couvre déjà 51 hectares et emploie près de 20.000 personnes. Cette année-là, 1.000 nouveaux logements sociaux, « pourvus d'un confort simple et d'une hygiène maximale » sont construits par l'entreprise.
Mais déjà, les nuages s'amoncellent. En 1931, c'est la mort d'André, suivie du retrait d'Edouard. Tandis que le fils aîné d'André, Marcel, supervise de Paris les services touristiques, le fils aîné d'Edouard, Etienne _ le père de François Michelin _, prend les rênes de l'entreprise. Un an plus tard, c'est le drame : passionné d'aviation, Etienne Michelin se tue dans un accident, obligeant Edouard à sortir de sa retraite. Il reprend du service le temps pour son second fils Pierre, alors âgé de vingt-neuf ans, de faire ses preuves. Aux drames familiaux s'ajoutent bientôt les effets de la crise économique des années 30. Durement frappée par l'effondrement de ses marchés, Michelin & Cie tente de s'en sortir en recherchant de nouveaux débouchés, comme la fameuse micheline, le premier autorail sur pneus dont le nom devait rester dans la mémoire des Français. Mais, surtout, la firme fait une entrée spectaculaire dans le monde de l'automobile en reprenant à la mort d'André Citroën, en 1934, les usines Citroën, alors au bord du dépôt de bilan, et dont Michelin est le principal créancier.
En 1937, alors que la fin de la crise semble se profiler, un deuxième drame frappe Edouard Michelin. Son fils Pierre se tue à son tour, cette fois dans un accident de voiture. Brisé, le patriarche décide alors de faire de son petit-fils François son successeur. En attendant que celui-ci ait l'âge requis, il dirige la firme avec son gendre Robert Puiseux, en qui il a toute confiance. Le duo ne durera pas longtemps : en 1940, Edouard Michelin s'éteint dans son manoir de La Baraque, près du village d'Orcines.
C'est à Robert Puiseux qu'il appartiendra de gérer la firme pendant les heures noires de l'Occupation. Si l'entreprise doit se prêter à un marché avec les Allemands _ accès aux fils de coton produits dans le nord occupé de la France contre stocks de caoutchouc brut _, Robert Puiseux ne se presse guère pour collaborer et ferme volontiers les yeux sur le sabotage de la production. Patron des essais et industriel de talent, le fils aîné d'André Michelin, Marcel, s'engage pour sa part résolument aux côtés de la Résistance, créant un refuge pour les réfractaires du STO avant de mettre en place des filières d'évacuation vers la Grande-Bretagne où deux de ses fils sont pilotes dans la RAF. Arrêté en 1943, Marcel Michelin mourra en déportation.
1949. Tandis que l'Europe panse ses plaies, Michelin fait un retour remarqué sur le marché en lançant le célèbre pneu Radial à bande d'acier, conçu dans le plus grand secret pendant la guerre. C'est aussi l'année où François Michelin fait ses premières armes dans l'entreprise. Né en 1926, très tôt orphelin de père et de mère, le petit-fils d'Edouard a été élevé à Annecy par une soeur de sa mère. Tenu à l'écart de l'université en raison des mauvaises fréquentations qu'il pouvait y faire, il a effectué toute sa scolarité dans un pensionnat religieux avant de décrocher une licence de mathématiques. En 1951, à vingt-cinq ans, ce jeune homme qui a connu une enfance un peu triste commence son véritable apprentissage aux usines Michelin, dans le plus total anonymat, d'abord comme ouvrier tourneur puis comme voyageur de commerce. En 1955, il entre au comité de direction comme cogérant. Trois ans plus tard, il devient seul gérant responsable. A trente-deux ans, le nouveau patron se présente comme un homme hors mode. Catholique pratiquant, affichant des opinions conservatrices, passionné d'innovation, entièrement dévoué à l'entreprise, ne quittant Clermont-Ferrand que s'il y est obligé, c'est un méditatif, un solitaire qui aime parcourir les usines, vêtu de costumes élimés, s'arrêtant pour saluer un visage familier. Avec lui, la tradition de secret et de discrétion de la famille atteint des sommets. Pendant longtemps, la firme, protégée de toute intrusion extérieure par son statut de société en commandite, communiquera sur elle-même avec la plus grande parcimonie alors qu'à l'inverse, sa publicité commerciale est d'une redoutable efficacité. Quant aux décisions, elles se prennent à la gérance, le coeur de l'entreprise.
D'un autre âge le style François Michelin ? Peut-être. Il n'empêche que son long mandat correspond à un essor remarquable de l'entreprise qui passera du dixième au premier ou deuxième rang mondial selon les péripéties des restructurations du secteur. Sous le règne de François Michelin, le groupe de Clermont-Ferrand devient l'une des rares entreprises industrielles françaises intégralement mondialisée. C'est à lui que la firme doit de se réimplanter de manière massive sur le marché américain que Michelin avait dû abandonner pendant la crise des années 30. Cette stratégie trouvera sa consécration en 1990 avec la reprise d'Uniroyal-Goodrich. C'est également François Michelin qui, en 1976, prend la décision de se désengager de Citroën, cédé au groupe Peugeot.
Au début des années 90, Edouard, l'un des six enfants de François est mis sur orbite. Né en 1963, il a fait ses premières armes à l'âge de seize ans, sur un établi de la vieille usine des Carmes. Choisi par son père parce qu'il est « le plus capable », le jeune Edouard se préparera longuement aux fonctions qui l'attendent. Diplômé de l'Ecole centrale, ce chrétien convaincu, passionné de théologie et de marche en montagne, et dont la seule fantaisie connue est le goût des belles voitures, effectue son stage de fin d'études dans l'usine Michelin de Greenville, en Caroline du Sud. En 1989 enfin, après un service militaire effectué comme officier de quart dans les sous-marins nucléaires, il commence son parcours dans l'entreprise : stage en usine puis sur les routes, avec les commerciaux de l'entreprise, responsable de fabrication, patron des usines Michelin et de l'activité poids lourds aux Etats-Unis. Et, enfin, l'entrée dans le saint des saints de la gérance en 1993. « L'iconoclaste » comme le surnomme son père devant la presse, un jour de confidence, a tôt fait d'imprimer sa marque sur l'entreprise plus que centenaire. De son long séjour aux Etats-Unis, où il travaillera notamment avec Carlos Ghosn, aujourd'hui patron de Nissan, Edouard Michelin a ramené de nouvelles idées et de nouveaux concepts. Revenu en France, sa première décision consistera ainsi à augmenter le prix des pneus de première monte. Dans le même temps, il s'attaque à une réforme de l'organisation et des méthodes de l'entreprise.

Ce n'est donc pas à un novice que François Michelin cède les rênes de l'entreprise en juin 1999. Prise de conscience des contraintes de rentabilité à venir dans un secteur automobile qui change de règles du jeu ? Volonté d'imprimer sa marque sur la gestion de la firme ? Toujours est-il que la première grande décision publique d'Edouard _ l'annonce concomitante de résultats conjoncturels corrects et de 7.500 suppressions d'emplois en Europe _ soulèvera, malgré les mesures d'accompagnement et l'absence quasi totale de licenciements secs, un véritable tollé dans la classe politique. Bien malgré lui, l'héritier de l'une des plus prestigieuses dynasties françaises des affaires devra assumer la notoriété du fameux « amendement Michelin » et des débats qui l'ont accompagné. Pas facile de se transformer en entreprise communicante quand pendant un siècle on a cultivé le goût du secret...

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